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ŒUVRES

les vapeurs qui sont épaisses dans l’Air, lorsqu’il en est le plus chargé, pesent autant que l’eau à la hauteur d’un pied huit poulces ; puisque pour les contrepeser, elles font hausser l’eau dans les Pompes à cette hauteur, par dessus celle où l’eau contrepesoit déja la pesanteur de l’Air : de sorte que, si toutes les vapeurs qui sont sur une contrée estoient reduites en eau, comme il arrive quand elles se changent en pluye, elles ne pourroient produire que cette hauteur d’un pied huit poulces d’eau sur cette contrée. Et s’il arrive par fois des orages où l’eau de la pluye qui tombe vienne à une plus grande hauteur, c’est parce que le vent y porte les vapeurs des contrées voisines.

Nous voyons aussi de là que, si toute la Sphere de l’air estoit pressée et comprimée contre la terre par une force qui, la poussant par le haut, la réduisist en bas à la moindre place qu’elle puisse occuper, et qu’elle la réduisist[1] comme en l’eau, elle auroit alors la hauteur de 31. pieds seulement,

Et, par consequent, qu’il faut considerer toute la masse de l’Air, en l’estat libre où elle est, de la mesme sorte que si elle eust esté autrefois comme une masse d’eau de 31. pieds de haut à l’entour de toute la terre, qui eust esté rarefiée et dilatée extrémement, et convertie en cet estat où nous l’appelons Air, auquel elle occupe, à la verité, plus de place,

  1. Bossut imprime avec raison peut-être : comme en eau.