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92 ŒUVRES

OU des responses qui ne sont de nulle importance, mais si fréquentes, qu'il n'en faut pas davantage à un si petit cerveau que le mien pour le troubler et luy faire brouiller tout ce qu'il fait, comme vous veoyez qu'il m'est arrivé. Et de plus, j'ay si peur que nostre Mère m'en trouve saisie que j'ay une merveilleuse haste de m'en défaire. Toutes ces raisons font que j'espère de votre bonté une pleine abolition ^ ; mais je désire quelque chose déplus, et vous conjure de tout mon cœur, ma chère Mère, de conjurer Nostre Seigneur qu'il me pardonne toutes les fau- tes que j'ay commises en cette affaire et le peu d'usage que j'ay fait de tant de salutaires avis. Ce n'a pas esté mon premier dessein en vous escrivant ; mais puisque Dieu m'en offre l'occasion, j'ay creu ne la devoir pas négliger. J'espère cet effet de vostre charité, que j'ay tant de fois esprouvée, et que, sans avoir égard à ce que je suis, vous ne me refuserez pas le secours dont j'ay besoin pour devenir ce que je ne suis pas, afin que ce ne soit plus en vain que j'aye receu l'avantage incomparable d'estre associée à une si sainte famille, soumise à une conduitte si sage et si remplie de l'esprit de Dieu, et fille de telles Mères. Et enfin je vous conjure d'offrir à Sa divine majesté tous ceux qui sont renfermez dans ma vocation à cette Maison, afin qu'il me fasse la grâce désormais d'éviter cette sorte d'ingratitude, qui se rencontre dans le peu d'usage qu'on fait des grandes faveurs.

��I. Uobolition signifiait dans l'ancien droit « le pardon que le roi accordait d'autorité absolue pour un crime » (Littre). L'emploi du mot dans un sens large a été signalé par Littré dans Bourdaloue : « C'est par là que Magdeleine, cette fameuse pécheresse et cette pé- nitente aussi célèbre, obtint l'entière abolition de tous les dérègle- ments de sa vie et qu'elle parvint à un degré si éminent de sainteté, » Pensées, t. II, p. i65.

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