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LETTRES DU P. NOËL 83

veines d'un corps vivant, est meslangé de bile, de pituite, de mélancolie et de sang, qui, pour sa plus notable quan- tité, donne au meslange le nom de sang ; de mesme l'air que nous respirons, est meslange de feu, d'eau, de terre et d'air, qui, pour sa plus grande quantité, luy donne le nom d'air. C'est le ^sens commun des physitiens, qui enseignent que les elemens sont meslangez.

Or, tout ainsy que ce meslange qui est dans nos veines est un meslange naturel au corps humain, faict et entre- tenu par le mouvement et action du corps qui le restablit, s'il est altéré, par exemple, de crainte ou de honte ; de mesme ce meslange qui est dans nostre air, est un mes- lange naturel au monde, faict et entretenu par le mouve- ment et action du soleil, qui le restablit, s'il est empesché par quelque violence. Donc, tout ainsy que la sépara- tion des parties qui composent notre sang, se peut faire dans les veines par quelque accident, comme elle se faict es ebulli lions qui séparent le plus subtil dans le grossier ; de mesme la séparation des parties qui composent nostre air peut se faire dans le monde par quelque violence. J'ap- pelle violence tout ce qui sépare ces corps naturellement unis et meslez par ensemble, laquelle ostée, les parties se rejoignent et se meslent comme auparavant, si leur nature n'est changée par la force et longueur de cette violence.

Je dis donc que dans le meslange naturel du corps que nous respirons, il y a du feu, qui est de sa nature plus subtil et plus rare que l'air ; et de l'air, lequel estant sé- paré de l'eau et de la terre, est plus subtil et plus rare que meslange avec l'un et l'autre, et partant peut pénétrer des corps et passer à travers les pores, estant séparé, qu'il ne

��L'orthographe du manuscrit est : sang commung.

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