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Séance du 10 avril 1793

la raison, qu’en renonçant à la Belgique, nous pourrions, avec plus de facilité, obtenir la paix des puissances ennemies. Brissot fut toujours le plus hardi des conspirateurs à jetter en avant les idées de transaction ouvertement proposées par Dumouriez. Dans la discussions de l’affaire de Louis XVI, il osa demander qu’il fût sursis à l’exécution du décret qui le condamnait, jusqu’à ce que l’opinion des puissances étrangères sur ce jugement nous fût manifestée[1]. C’est lui qui nous avait menacé de la colère des rois de l’Europe, si nous osions prononcer la peine de mort contre le tyran. Brissot ! Combien de faits n’aurais-je pas à rappeller sur lui et sur la faction dont il est le chef !

Enfin, nous avons vu le Comité de défense générale s’appliquer constamment à retarder toute mesure nécessaire au salut public, pour donner le tems à Dumouriez d’exécuter sans obstacle ses détestables projets. Ensuite on le recomposa de 25 membres qui lui appartenaient tous, excepté cinq à six patriotes qu’il y avait introduits par une sorte de transaction, pour endormir les amis de la liberté, et faire servir des noms qui inspiraient la confiance à couvrir leurs perfidies. Aussi Dumouriez écrivait-il que ce comité était bien composé, à l’exception de 7 à 8 membres. Indigné de tant de perfidies, et reconnaissant le motif qui avait engagé les intrigans à me choisir, je déclarai hautement à la Convention nationale, que ce comité n’était que le conseil de Dumouriez, et que, ne pouvant lutter contre la majorité, je donnais publiquement ma démission[2]. Nous avons vu avec douleur, qu’égarée par la même influence, la Convention avait envoyé à Dumouriez cinq commissaires dont l’arrestation était concertée d’avance, et sur-tout ce Beurnonville qui fut arrêté par son complice ? [3]

  1. Voir l’opinion de Brissot dans le Mon., XV, 221.
  2. Voir ci-dessus, séanoe du 3 lavril. Le même jour, le véritable Comité de salut public fut constitué sur da proposition d’Isnard, et son installation décidée le 6 (Auulard, Recueil des actes, III, 11 : 2 ;). Il était composé de 9 membres : Barère, Cambon, Danton, Jean Debry, Guyton-Morveau, Treilhard et Delacroix (d’Eure-et-Loir).
  3. Sur la proposition du Comité de défense génériale, la Convention avait décidé, le 30 mars, l’envoi de cinq commissaires : Camus, Lamarque, Quinette, Bancal et Carnot, accompagnés du ministre Beurnonville pour suspendre et arrêter Dumouriez et tous officiers et personnes suspectes de son entourage. (Aulard, Recueil des actes…, II, 574-576). Carnot, qui se trouvait alors à Arras, ne put rejoindrie ses collègues et échappa ainsi à leur sort. Les autres joignirent Dumouriez à son quartier général de Saint-Amand, le 1er  avril. Le général refusa d’obéir au décret qui le mandait à Paris, mit les commissaires et le ministre en état d’arrestation, les fit transférer à Tournai dans la nuit, et là, ils furent livrés aux Autrichiens. Captifs à Maëstricht jusqu’au 23 mai suivant, ils furent ensuite enfermés pendant cinq semaines à Coblentz, et, après avoir passé quinze jours à Wurtzbourg, ils furent séparés les uns des autres, conduits et enfermés à Kœnigsgrœtz, Spielberg, Olmùtz. Le 12 messidor III, un décret autorisa le Comité de salut public à les échianger contre la fille de Louis XVI. Ils furent rendus à la liberté à la fin du mois de décembre suivant et vinrent prendre séance au Conseil des Cinq Cents, le 12 niv. IV. Camus fit son rapport sur cette tragique mission, les 12, 13 et 17 janvier 1796.