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Séance du 10 avril 1793

Cependant le centre et l’aile droite, suivant lui, ont eu l’avantage ; aile gauche a plié. Or,l’aile gauche était composée précisément par ce même Miranda, qui avait trahi à Maëstricht. La suite de ce nouvel échec est la perte de la Belgique. Alors Dumouriez se découvre tout entier ; il se déclare ouvertement pour les généraux perfides : il se plaint du décret qui demande à la barre Stengel et Lanoue[1] ; il fait le plus pompeux éloge de ce dernier, convaincu d’avoir conspiré en faveur du tyran, avant la révolution du mois d’août. Il veut que la Convention imite le sénat romain, et qu’elle remercie les traîtres de n’avoir pas désespéré de la patrie ; il menace de l’abandonner, si on contrarie aucune de ses vues. Il loue le civisme et le courage de Miranda et de tous les autres généraux et officiers, sans distinction. Il impute tous nos maux à nos soldats ; iloublie que lui-même les avait attribués à celui qui commandait à Aix-la-Chapelle ;il oublie qu’il avait lui-même vanté le courage et la conduite de l’armée, et surtout la patience héroïque avec laquelle elle avait supporté la disette et des fatigues au-dessus des forces humaines, dans tous les tems, et récemment encore au siège de Maëstricht. Il prétend que l’armée n’est qu’un ramas de lâches et de pillards : ce sont ses propres expressions. Il fait plus ; il déclame, avec la même insolence, contre les nouveaux défenseurs qui volent dans la Belgique de toutes les parties de la république pour réparer ces revers : il les appelle des brigands.[2]

Tandis qu’il écrivait tout cela, il abandonnait la Belgique aux despotes ; il leur abandonnait nos immenses provisions qu’il y avait ramassées ; il avait ordonné aux commissaires de compter quatre millions Belges ; mais auparavant, il avait eu soin en partant d’y éteindre, autant qu’il était en lui, toute espèce d’affection pour les principes de notre révolution, et d’y allumer la haine du nom français ; il avait été jusqu’à publier hautement, dans une lettre adressée à la Convention, que la Providence punissait le peuple français de ses injustices : il avait peint Paris comme un théâtre de sang et de carnage ;la France comme le séjour du crime et de l’anarchie ;les députés patriotes de la Convention, comme des fous, ou comme des scélérats. Il avait fait des proclamations qui, sous le prétexte de réprimer certains actes impolitiques, tendaient à réveiller tous les préjugés du fanatisme et de l’aristocratie. Il avait rétabli dans leurs fonctions les administrateurs destitués pour cause d’incivisme, par les commissaires de la Convention nationale ; il avait détruit les sociétés populaires, attachées à notre cause. Il a voulu excuser tous ces forfaits, en disant que l’on avait irrité les Belges par quelques actes de cupidité et d’irreligion. Sans doute c’était

  1. Voir « Lettres... à ses commettans ) », 2e série, n° 9, p. 460.
  2. Voir « Lettres... à ses coanmettans », 2e série, n° 9, p. 453.