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Séance du 28 décembre 1792

SÉANCE DU 28 DÉCEMBRE 1792 185

but ; il vaudroit mieux que vous eussiez absolument oublié le soin de le punir que de faire de son procès une source de troubles et un commencement de guerre civile. Chaque instant de retaid amène pour nous un nouveau danger ; tous îes délais réveillent les espérances coupables, encouragent l’audace des ennemis de la liberté, nourrissent au sein de cette assemblée la sombre défiance, les soupçons cruels ; citoyens, c’est la voix de la patrie allarmée qui vous presse de hâter la décision qui doit la rassurer. Quel scrupule enchaîne encore votre zèle ? Je n’en trouve le motif ni dans les principes des amis de rhumanité, ni dans ceux des philosophes, ni dans ceux des hommes d’Etat, ni même dans ceux des praticiens les plus subtils et les plus épineux. La procédure est arrivée à son dernier terme. Avant-hier, l’accusé vous a déclaré qu’il n’avoit rien de plus à dire pour sa défense ; il a reconnu que toutes les formes qu’il désiroit étoient remplies ; il a déclaré qu’il n’en exigeoit point d’autres. Le moment même où il vient de faire entendre sa justification est le plus favorable à sa cause. Il n’est pas de tribunal au monde qui n’adoptât, en sûreté de conscience, un pareil système. Un malheureux pris en flagrant délit, ou prévenu seulement d’un crime ordinaire, sur des p/euves mille fois moins éclatantes, eût été condamné dans 24 heures. Fondateurs de la république, selon ces principes, vous pouviez juger, il y a long-tems, avec sécurité, le tyran du peuple français. Quel était le motif d’un nouveau délai ? Vouliez- vous acquérir de nouvelles preuves écrites contre l’accusé ? non. Vouliez- vous faire entendre des témoins ? cette idée n’est encore entrée dans la tête d’aucun de nous. Doutiez-vous du crime ? non. Vous auriez douté de la légitimité ou de la nécessité de l’insurrection ; vous douteriez de ce que la nation croit fermement ; vous seriez étranger à notre révolution ; et loin de punir le tyran, c’est à la nation elle-même que vous auriez fait le procès. Avant-hier, le seul motif que l’on ait allégué pour prolonger la décision de cette affaire, a été la nécessité de mettre à l’aise la conscience des membres, que l’on a supposés n’être point encore convaincus des attentats de Louis. Cette supposition gratuite, injurieuse et absurde a été démentie par la discussion même. (7) Citoyens, il importe ici de jeter un regard sur le passé et de vous retracer à vous-mêmes vos propres principes et même vos propres engagemens. Déjà, frappés des grands intérêts que je viens de vous représenter, vous aviez fixé deux fois, par deux décrets solemnels, l’époque où vous deviez juger Louis irrévocablement ; avant-hier étoit (7) Voir séance de la Convention du 26 déc. 1792^ (,Mon., XIV, 843-854 Manuel avait, après le discours de De Sèze, demandé un délai pour l’impression des pièces du procès, et Lanjuinais s’était efforcé de faire rapporter le décret d’accusation (Cf. A-Ma, thiez, La Révolution française, Coll. Colin, II, 133).