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LES PARISIENS EN PROVINCE : LA MUSE DU DÉPARTEMENT.
Voilà ma vie depuis trente mois ! Dans cette prison de marbre, mes cris ne peuvent parvenir à aucune oreille. Pas de hasard pour moi. Je n’espérais plus ! En effet, la chambre de la duchesse est au fond du palais, et ma voix, quand j’y monte, ne peut être entendue de personne. Chaque fois que je vois ma femme, elle me montre le poison que j’avais préparé
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OLYMPIA,


pour elle et pour son amant ; je le demande pour moi, mais elle me refuse la mort, elle me donne du pain et je mange ! J’ai bien fait de manger, de vivre, j’avais compté sans les bandits !…

— Oui, Excellence, quand ces imbéciles d’honnêtes gens sont endormis, nous veillons, nous…

— Ah ! Rinaldo, tous mes trésors sont à toi, nous les partagerons en frères, et je voudrais te donner tout… jusqu’à mon duché…

— Excellence, obtenez-moi du pape une absolution in articulo mortis, cela me vaudra mieux pour faire mon état.

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OU LES VENGEANCES ROMAINES.

— Tout ce que tu voudras ; mais lime les barreaux de ma cage et prête-moi ton poignard… Nous n’avons guère de temps, va vite… Ah ! si mes dents étaient des limes… J’ai essayé de mâcher ce fer…

— Excellence, dit Rinaldo en écoutant les dernières paroles du duc, j’ai déjà scié un barreau.

— Tu es un dieu !

— Votre femme était à la fête de la princesse Villaviciosa ; elle est revenue avec son petit Français, elle est