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II. LIVRE, SCÈNES DE LA VIE DE PROVINCE.

d’un cerveau complet était boiteuse. Quelques charlatans, comme Walter Scott, qui pouvaient réunir les cinq sens littéraires, s’étant alors montrés, ceux qui n’avaient que de l’esprit, que du savoir, que du style ou que du sentiment, ces éclopés, ces acéphales, ces manchots, ces borgnes littéraires se sont mis à crier que tout était perdu, ils ont prêché des croisades contre les gens qui gâtaient le métier, ou ils en ont nié les œuvres.

— C’est l’histoire de vos dernières querelles littéraires, fit observer Dinah.

— De grâce ! s’écria monsieur de Clagny, revenons au duc de Bracciano.

Au grand désespoir de l’assemblée, Lousteau reprit la lecture de la bonne feuille.

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OLYMPIA,

Alors je voulus m’assurer de mon malheur, afin de pouvoir me venger sous l’aile de la Providence et de la Loi. La duchesse avait deviné mes projets. Nous nous combattions par la pensée avant de nous combattre le poison à la main. Nous voulions nous imposer mutuellement une confiance que nous n’avions pas ; moi pour lui faire prendre un breuvage, elle pour s’emparer de moi. Elle était femme, elle l’emporta ; car les femmes ont un piége de plus que nous autres à tendre, et j’y tombai : je fus heureux ; mais le lendemain matin je me réveillai dans cette cage de fer. Je rugis pendant toute la journée dans l’obscurité

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OU LES VENGEANCES ROMAINES.

de cette cave, située sous la chambre à coucher de la duchesse. Le soir, enlevé par un contre-poids habilement ménagé, je traversai les planchers et vis dans les bras de son amant la duchesse qui me jeta un morceau de pain, ma pitance de tous les soirs.