Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, VI.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cherchant à comprendre le sens des rapides paroles que tout le monde prodiguait. Il prit l’écrit de monsieur Caron, et le lut, comme si le libellé de l’avocat allait être l’objet de son attention, mais ce fut un mouvement machinal. Et il signa cette pièce, par laquelle il reconnaissait renoncer volontairement à demeurer chez mademoiselle Gamard, comme à y être nourri suivant les conventions faites entre eux. Quand le vicaire eut achevé d’apposer sa signature, le sieur Caron reprit l’acte et lui demanda dans quel endroit sa cliente devait faire remettre les choses à lui appartenant. Birotteau indiqua la maison de madame de Listomère. Par un signe, cette dame consentit à recevoir l’abbé pour quelques jours, ne doutant pas qu’il ne fût bientôt nommé chanoine. Le vieux propriétaire voulut voir cette espèce d’acte de renonciation, et monsieur Caron le lui apporta.

— Eh ! bien, demanda-t-il au vicaire après l’avoir lu, il existe donc entre vous et mademoiselle Gamard des conventions écrites ? Où sont-elles ? quelles en sont les stipulations ?

— L’acte est chez moi, répondit Birotteau.

— En connaissez-vous la teneur ? demanda le propriétaire à l’avocat.

— Non, monsieur, dit monsieur Caron en tendant la main pour reprendre le papier fatal.

— Ah ! se dit en lui-même le vieux propriétaire, toi, monsieur l’avocat, tu sais sans doute tout ce que cet acte contient ; mais tu n’es pas payé pour nous le dire.

Et monsieur de Bourbonne rendit la renonciation à l’avocat.

— Où vais-je mettre tous mes meubles ? s’écria Birotteau, et mes livres, ma belle bibliothèque, mes beaux tableaux, mon salon rouge, enfin tout mon mobilier !

Et le désespoir du pauvre homme, qui se trouvait déplanté pour ainsi dire, avait quelque chose de si naïf ; il peignait si bien la pureté de ses mœurs, son ignorance des choses du monde, que madame de Listomère et mademoiselle Salomon lui dirent pour le consoler, en prenant le ton employé par les mères quand elles promettent un jouet à leurs enfants : — N’allez-vous pas vous inquiéter de ces niaiseries-là ? Mais nous vous trouverons toujours bien une maison moins froide, moins noire que celle de mademoiselle Gamard. S’il ne se rencontre pas de logement qui vous plaise, eh ! bien, l’une de nous vous prendra chez elle en pension. Allons, faisons un