où l’époux mit rarement les pieds. À l’insu de tout le monde, Philippe acheta pour deux cent cinquante mille francs, rue de Clichy, dans un moment où personne ne soupçonnait la valeur que ce quartier devait un jour acquérir, un magnifique hôtel sur le prix duquel il donna cinquante mille écus de ses revenus, en prenant deux ans pour payer le surplus. Il y dépensa des sommes énormes en arrangements intérieurs et en mobilier, car il y consacra ses revenus pendant deux ans. Les superbes tableaux restaurés, estimés à trois cent mille francs, y brillèrent de tout leur éclat.
L’avènement de Charles X avait mis encore plus en faveur qu’auparavant la famille du duc de Chaulieu, dont le fils aîné, le duc de Rhetoré, voyait souvent Philippe chez Tullia. Sous Charles X, la branche aînée de la maison de Bourbon se crut définitivement assise sur le trône, et suivit le conseil que le maréchal Gouvion-Saint-Cyr avait précédemment donné de s’attacher les militaires de l’Empire. Philippe, qui sans doute fit de précieuses révélations sur les complots de 1820 et 1822, fut nommé lieutenant-colonel dans le régiment du duc de Maufrigneuse. Ce charmant grand seigneur se regardait comme obligé de protéger un homme à qui il avait enlevé Mariette. Le Corps de Ballet ne fut pas étranger à cette nomination. On avait d’ailleurs décidé dans la sagesse du conseil secret de Charles X de faire prendre à Monseigneur le Dauphin une légère couleur de libéralisme. Monsieur Philippe, devenu quasiment le menin du duc de Maufrigneuse, fut donc présenté non-seulement au Dauphin, mais encore à la Dauphine à qui ne déplaisaient pas les caractères rudes et les militaires connus par leur fidélité. Philippe jugea très bien le rôle du Dauphin, et il profita de la première mise en scène de ce libéralisme postiche, pour se faire nommer aide-de-camp d’un Maréchal très-bien en cour.
En janvier 1827, Philippe, qui passa dans la Garde Royale lieutenant-colonel au régiment que le duc de Maufrigneuse y commandait alors, sollicita la faveur d’être anobli. Sous la Restauration, l’anoblissement devint un quasi-droit pour les roturiers qui servaient dans la Garde. Le colonel Bridau, qui venait d’acheter la terre de Brambourg, demanda la faveur de l’ériger en majorat au titre de comte. Il obtint cette grâce en mettant à profit ses liaisons dans la société la plus élevée, où il se produisait avec un faste de voitures et de livrées, enfin dans une tenue de grand seigneur. Dès que Philippe, lieutenant-colonel du plus beau régiment de cavalerie