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un artiste, et que l’étoffe est remarquable. Jamais je n’avais pris garde à Mlle Perle.

Elle faisait partie de la famille Chantal, voilà tout ; mais comment ? À quel titre ? C’était une grande personne maigre qui s’efforçait de rester inaperçue, mais qui n’était pas insignifiante. On la traitait amicalement, mieux qu’une femme de charge, moins bien qu’une parente. Je saisissais tout à coup, maintenant, une quantité de nuances dont je ne m’étais point soucié jusqu’ici ! Mme Chantal disait : « Perle. » Les jeunes filles : « Mlle Perle », et Chantal ne l’appelait que Mademoiselle, d’un air plus révérend peut-être.

Je me mis à la regarder. — Quel âge avait-elle ? Quarante ans ? Oui, quarante ans. — Elle n’était pas vieille, cette fille, elle se vieillissait. Je fus soudain frappé par cette remarque. Elle se coiffait, s’habillait, se parait ridiculement, et, malgré tout, elle n’était point ridicule, tant elle portait en elle de grâce simple, naturelle, de grâce voilée, cachée avec soin. Quelle drôle de créature, vraiment ! Comment ne l’avais-je jamais mieux observée ? Elle se coiffait d’une façon grotesque, avec de petits frisons vieillots tout à fait farces ; et, sous cette chevelure à la Vierge