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de voir un héritier de sa race. Elle répondit à tous mes raisonnements par l’expression de plus en plus formelle de sa volonté, qui se basait d’ailleurs sur un sentiment religieux, toute union stérile, pensait-elle, étant un signe de malédiction céleste. Je n’ai pu modifier en rien ses intentions. Croyez que je le regrette bien vivement. » Puis il ajouta, en souriant vers Coralie : « Je ne doute pas que le desideratum de la défunte ne soit bien vite réalisé. »

Et les trois parents s’en allèrent, trop effarés pour penser à rien.

Ils regagnaient leur domicile, côte à côte, sans parler, honteux et furieux, comme s’ils s’étaient mutuellement volés. Toute la douleur de Cora s’était soudain dissipée, l’ingratitude de sa tante la dispensant de la pleurer. Lesable, enfin, dont les lèvres pâles étaient serrées par une contraction de dépit, dit à son beau-père : « Passez-moi donc cet acte, que j’en prenne connaissance de visu. » Cachelin lui tendit le papier, et le jeune homme se mit à lire. Il s’était arrêté sur le trottoir et, tamponné par les passants, il resta là, fouillant les mots de son œil perçant et pratique. Les deux autres l’attendaient, deux pas en avant, toujours muets.

Puis il rendit le testament en déclarant :