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avec joie le rôle, quelque humble qu’il soit, qu’il jugera utile de nous assigner. Amis de la liberté, unissons-nous d’abord, mettons avec confiance la main à l’œuvre, pensons toujours au succès de notre principe, jamais à nos propres succès, et laissons à la cause, dans sa marche progressive, le soin de nous porter en avant. Quand la lutte sera engagée, assez de résistances nous mettront à l’épreuve, pour que chacun déploie ses ressources ; et qui sait alors combien se révéleront de talents ignorés et de vertus assoupies ? L’agitation est un grand crible qui classe les individualités selon leur pesanteur spécifique. Elle manifestera un homme et plusieurs hommes ; et nous nous trouverons, sans nous en apercevoir, coordonnés dans une naturelle et volontaire hiérarchie.

Faut-il le dire ? Ce que je crains, ce n’est pas que l’homme de génie fasse défaut à la Ligue ; mais plutôt que la Ligue fasse défaut à l’homme de génie. Les vertus individuelles jaillissent de la vertu collective comme l’étincelle électrique de nuages saturés d’électricité. Si chacun de nous apporte à la Ligue un ample tribut de zèle, de conviction, d’efforts et d’enthousiasme, ah ! ne craignons pas que ces forces demeurent inertes, faute d’une main qui les dirige ! Mais si le corps entier est apathique, indifférent, dégoûté, inconstant et railleur, alors sans doute les hommes nous manqueront, — et qu’en ferions-nous ?

Ce qui a fait le succès de la Ligue, en Angleterre, c’est une chose, une seule chose, la foi dans une idée. Ils n’étaient que sept, mais ils ont cru ; et, parce qu’ils ont cru, ils ont voulu ; et, parce qu’ils ont voulu, ils ont soulevé des montagnes. La question pour moi n’est pas de savoir s’il y a des hommes à Bordeaux, mais s’il y a de la foi dans Israël.

5o Je voulais parler aujourd’hui de la question financière, mais le sujet est trop vaste pour l’espace qui me reste. Je le