Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 7.djvu/314

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais il n’en est pas ainsi, je vois dans un secrétaire des commandements, le représentant, non d’une opinion politique, mais d’une pensée individuelle, et de cette pensée même à laquelle le droit électoral doit servir de barrière. Une telle candidature nous jette hors du régime représentatif, elle en est plus que la déviation, elle en est la dérision ; et il semble qu’en la proposant, le pouvoir ait résolu d’expérimenter jusqu’où peut aller la simplicité du corps électoral[1]. Sans avoir d’objection personnelle contre M. Larnac, j’en ai une si grave contre sa position, que je ne le nommerai pas, quoi qu’il arrive ; et, de plus, si besoin est, je nommerai son adversaire, fût-ce un légitimiste. — Quelle que puisse être la pensée secrète des partisans de la branche ainée, je la redoute moins que les desseins du pouvoir actuel, manifestés par l’appui qu’il prête à une telle candidature. Je hais les révolutions ; mais elles prennent des formes diverses, et je considère, comme une révolution de la pire espèce, ce systématique envahissement de la représentation nationale par les agents du pouvoir, et, qui pis est, du pouvoir irresponsable. Si donc je me trouve dans la cruelle alternative d’opter entre un secrétaire des commandements et un légitimiste, mon parti est pris, je nommerai le légitimiste. Si l’arrière-pensée qu’on prête à ce parti, a quelque réalité, je la déplore ; mais je ne la redoute pas, convaincu que le principe de la souveraineté nationale a assez de vie, en France, pour triompher encore une fois de ses adversaires. Mais, avec une Chambre peuplée de créatures du pouvoir, le pays, sa fortune et sa liberté, sont sans défense ; et c’est là qu’est le germe d’une révolution

  1. Il est facile d’inférer de ce passage et de plusieurs autres, que Bastiat eut porté deux jugements sur ce qu’on nomme aujourd’hui les candidatures officielles. 1o Il y aurait vu une dérision du régime représentatif ; 2o cette dérision lui eut semblé plus triste que nouvelle. (Note de l’éditeur.)