Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 7.djvu/198

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui lui montrent la vérité, la cause et le remède de ses souffrances ; car si elles venaient à s’adoucir, le peuple se rallierait à l’ordre social actuel, et ne se prêterait plus docilement à nos desseins. »

Une perversité aussi machiavélique ne peut germer que dans bien peu de têtes. J’aime mieux examiner l’explication que donnent les démocrates eux-mêmes de leur opposition au libre-échange, tout en reconnaissant que c’est un principe de vérité et de justice.

Quand je leur ai demandé les motifs de leur opposition, ils m’ont répondu : D’abord, le Gouvernement favorise votre entreprise. Ensuite, le libre-échange, par ses tendances pacifiques, interromprait la grande mission de la France qui est de propager en Europe l’idée démocratique, au besoin par les armes.

Quant au premier motif, je déclare de la manière la plus formelle que l’Association du libre-échange n’a eu avec le Gouvernement aucune communication, si ce n’est pour obtenir l’autorisation exigée par la loi. Pour ce qui me regarde, je n’ai jamais vu M. Guizot ni M. Duchatel. Un discours de M. Guizot me fait présumer qu’il a le sentiment confus qu’en matière d’échanges, la liberté vaut mieux que la restriction. M. Duchatel, avant d’être ministre, a fait une brochure où les vrais principes économiques sont exposés avec une grande clarté. Mais quoi ! sommes-nous tenus de repousser une liberté précieuse parce que M. Duchatel a écrit, dans sa jeunesse, une brochure en sa faveur ?

Et quand il serait vrai que les secrètes sympathies du Ministère fussent pour nous, quand il serait vrai que, fatigués des exigences, des obsessions des protectionistes, les Ministres songeassent à décharger le Gouvernement du joug que le système restrictif fait peser sur lui, devrions-nous pour cela défendre ce système ? Je sais bien que c’est ainsi que raisonnent les partis : Entravons la marche du Gouverne-