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qui l’achète. C’est une des plus belles et des plus fécondes harmonies de l’ordre naturel des sociétés, harmonie dont les protectionistes ne tiennent pas compte, parce qu’ils ne se préoccupent jamais du consommateur, mais seulement du producteur national.

Eh bien ! je veux me placer à leur point de vue et examiner aussi l’intérêt producteur.

À ce point de vue, la supériorité des capitaux étrangers est un désavantage pour nous.

Mais on m’accordera sans doute que ce serait un bien triste et bien absurde remède que celui qui se bornerait à paralyser dans nos mains le peu de capitaux qui s’y trouvent.

Or c’est là ce que fait le régime protecteur.

Nous nous plaignons que la somme de nos capitaux ou le capital national est faible. Et que fait ce régime ? Il nous astreint à en prélever, pour chaque entreprise déterminée, une portion plus grande que celle qui serait nécessaire sous le régime de la liberté.

Qu’un Anglais fonde en Angleterre une fabrique et qu’un Français veuille établir en France une usine parfaitement identique. En dégageant par la pensée ces opérations de toutes autres circonstances, et ne tenant compte que du régime protecteur, comme il faut le faire pour en apprécier les effets, n’est-il pas vrai que le Français sera obligé, à cause de ce régime, de se pourvoir d’un capital fixe plus considérable que celui de l’Anglais, puisqu’il ne peut pas, comme l’Anglais, aller chercher ses machines partout où elles sont à meilleur marché ? N’est-il pas vrai qu’il en sera de même du capital circulant, puisque ce régime a pour effet et même pour but d’élever le prix de toutes les matières premières ? Ainsi vous vous plaignez de ce que le Français éprouve déjà le désavantage de payer son capital à 5 pour 100 quand l’Anglais ne le paye que 3 pour 100 ; et que faites-vous pour compenser ce désavantage ? Vous obligez le Français à em-