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objections qu’on a élevées contre la portée, les vues et les procédés de cette Association.

On a dit : « que nous nous tenions trop dans le domaine des généralités ;

« Que nous aurions dû concentrer nos efforts sur un seul monopole, et qu’en les attaquant tous nous effrayions trop d’intérêts ;

« Que, dans notre programme, nous avions gardé le silence sur l’intérêt maritime. »

Si l’on veut bien s’assurer où est l’obstacle à la liberté commerciale, la première objection disparaît.

Il est tout entier, en effet, dans la puissance d’une généralité très-populaire, et c’est celle-ci : « Il ne faut rien tirer du dehors de ce qu’on peut faire au dedans ; un peuple ne doit pas se procurer par l’échange ce qu’il peut se procurer par la production. »

Ce principe (car c’en est un, seulement il est faux) tend à anéantir le commerce extérieur. Il a la prétention de favoriser le travail national et repose sur cette présomption que, lorsque nous consommons un produit étranger, ce produit n’est pas dû à notre travail. Je n’ai pas besoin de dire ici que c’est là une erreur. Sans doute le produit est étranger ; mais sa valeur est nationale, puisqu’on l’a acquise avec du travail national donné en échange. Elle est un peu comme ces sermons de l’abbé Roquette, dont on disait :


Moi qui sais qu’il les achète,
Je soutiens qu’ils sont à lui.


Ceci me rappelle que, visitant le palais de la reine d’Espagne, je m’extasiais sur la beauté des meubles, des tapis, des rideaux, et demandais à un grave concierge castillan si c’étaient des produits de l’industrie espagnole. Il me répondit fièrement : « Hombre, aqui todo es español… pues lo hemos pagado. »