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moins le principe absolu de la multiplication. — Il y a un terme à l’accroissement du nombre des hommes de la classe laborieuse : c’est celui où le fonds progressif de la rémunération est insuffisant pour les faire vivre. Il n’y en a pas à leur amélioration possible, parce que, des deux éléments qui la constituent, l’un, la richesse, grossit sans cesse, l’autre, la population, tombe dans la sphère de leur volonté.

Tout ce que nous venons de dire de la dernière couche sociale, celle où s’exécute le travail le plus brut, s’applique aussi à chacune des autres couches superposées et classées entre elles en raison inverse, pour ainsi dire, de leur grossièreté, de leur matérialité spécifique. À ne considérer chaque classe qu’en elle-même, toutes sont soumises aux mêmes lois générales. Dans toutes, il y a lutte entre la puissance physiologique de multiplication et la puissance morale de limitation. La seule chose qui diffère d’une classe à l’autre, c’est le point de rencontre de ces deux forces, la hauteur où la rémunération porte, où les habitudes fixent, entre les deux lois, cette limite qu’on nomme moyens d’existence.

Mais si nous considérons les diverses couches, non plus en elles-mêmes, mais dans leurs rapports réciproques, je crois que l’on peut discerner l’influence de deux principes agissant en sens inverse, et c’est là qu’est certainement l’explication de la condition réelle de l’humanité. — Nous avons établi comment tous les phénomènes économiques, et spécialement la loi de la concurrence, tendaient à l’égalité des conditions ; cela ne nous paraît pas théoriquement contestable, Puisque aucun avantage naturel, aucun procédé ingénieux, aucun des instruments par lesquels ces procédés sont mis en œuvre, ne peuvent s’arrêter définitivement aux producteurs en tant que tels ; puisque les résultats, par une dispensation irrésistible de la Providence, tendent à devenir le patrimoine commun, gratuit, et par