Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/535

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

préventive : donc les moyens d’existence s’accroissent plus vite que la population. Non-seulement ce résultat dérive du principe de la perfectibilité, mais encore il est confirmé par le fait, puisque partout le cercle des satisfactions s’est étendu. — S’il était vrai, comme le dit Malthus, qu’à chaque excédant de moyens d’existence corresponde un excédant supérieur de population, la misère de notre race serait fatalement progressive, la civilisation serait à l’origine, et la barbarie à la fin des temps. Le contraire a lieu ; donc la loi de limitation a eu assez de puissance pour contenir le flot de la multiplication des hommes au-dessous de la multiplication des produits.

On voit par ce qui précède combien est vaste et difficile la question de la population. Il est à regretter sans doute que l’on n’en ait pas donné la formule exacte, et naturellement je regrette encore plus de ne pouvoir la donner moi-même. Mais ne voit-on pas combien le sujet répugne aux étroites limites d’un axiome dogmatique ? Et n’est-ce point une vaine tentative que de vouloir exprimer par une équation inflexible les rapports de données essentiellement variables ? — Rappelons ces données.

Loi de multiplication. Puissance absolue, virtuelle, physiologique, qui est en la race humaine de propager la vie, abstraction faite de la difficulté de l’entretenir. — Cette première donnée, la seule susceptible de quelque précision, est la seule où la précision soit superflue ; car qu’importe où est cette limite supérieure de multiplication dans l’hypothèse, si elle ne peut jamais être atteinte dans la condition réelle de l’homme, qui est d’entretenir la vie à la sueur de son front ?

2° Il y a donc une limite à la loi de multiplication. Quelle est cette limite ? Les moyens d’existence, dit-on. Mais qu’est-ce que les moyens d’existence ? C’est un ensemble de satisfactions insaisissable. Elles varient, et, par conséquent, dé-