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aux classes attardées. Que si la réponse à ces questions est affirmative, on peut dire que l’harmonie sociale est constatée, et que la Providence serait justifiée à nos yeux, si elle avait besoin de l’être.

Après cela, l’homme étant doué de volonté et de libre arbitre, il est certain que les bienfaisantes lois de la Providence ne lui profitent qu’autant qu’il s’y conforme ; et, quoique j’affirme sa nature perfectible, je n’entends certes pas dire qu’il progresse même alors qu’il méconnaît ou viole ces lois. Ainsi, je dis que les transactions mutuelles, libres, volontaires, exemptes de fraude et de violence, portent en elles-mêmes un principe progressif pour tout le monde. Mais ce n’est pas là affirmer que le progrès est inévitable et qu’il doit jaillir de la guerre, du monopole et de l’imposture. Je dis que le salaire tend à s’élever, que cette élévation facilite l’épargne, et que l’épargne, à son tour, élève le salaire. Mais si le salarié, par des habitudes de dissipation et de débauche, neutralise à l’origine cette cause d’effets progressifs, je ne dis pas que les effets se manifesteront de même, car le contraire est impliqué dans mon affirmation.

Pour soumettre à l’épreuve des faits la déduction scientifique, il faudrait prendre deux époques : par exemple 1750 et 1850.

Il faudrait d’abord constater quelle est, à ces deux époques, la proportion des prolétaires aux propriétaires. On trouverait, je le présume, que, depuis un siècle, le nombre des gens qui ont quelques avances s’est beaucoup accru, relativement au nombre de ceux qui n’en ont pas du tout.

Il faudrait ensuite établir la situation spécifique de chacune de ces deux classes, ce qui ne se peut qu’en observant leurs satisfactions. Très-probablement on trouverait que, de nos jours, elles tirent beaucoup plus de satisfactions réelles,