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sables, les lois harmoniques que nous nous sommes efforcés de découvrir et de décrire.

Notre tâche ne sera donc accomplie que lorsque nous aurons fait la complète monographie de la Spoliation.

Peut-être pensera-t-on qu’il s’agit d’un fait accidentel, anormal, d’une plaie passagère, indigne des investigations de la science.

Mais qu’on y prenne garde. La Spoliation occupe, dans la tradition des familles, dans l’histoire des peuples, dans les occupations des individus, dans les énergies physiques et intellectuelles des classes, dans les arrangements de la société, dans les prévisions des gouvernements, presque autant de place que la Propriété elle-même.

Oh ! non, la Spoliation n’est pas un fléau éphémère, affectant accidentellement le mécanisme social, et dont il soit permis à la science économique de faire abstraction.

Cet arrêt a été prononcé sur l’homme dès l’origine : Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front. Il semble que, par là, l’effort et la satisfaction sont indissolublement unis, et que l’une ne puisse jamais être que la récompense de l’autre. Mais partout nous voyons l’homme se révolter contre cette loi, et dire à son frère : À toi le travail ; à moi le fruit du travail.

Pénétrez dans la hutte du chasseur sauvage, ou sous la tente du nomade pasteur. Quel spectacle s’offre à vos regards ? La femme, maigre, défigurée, terrifiée, flétrie, avant le temps, porte tout le poids des soins domestiques, pendant que l’homme se berce dans son oisiveté. Où est l’idée que nous pouvons nous faire des Harmonies familiales ? Elle a disparu, parce que la Force a rejeté sur la Faiblesse le poids de la fatigue. Et combien faudra-t-il de siècles d’élaboration civilisatrice avant que la Femme soit relevée de cette effroyable déchéance !

La Spoliation, sous sa forme la plus brutale, armée de la