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lois régulières de l’ordre social et les causes perturbatrices de ces lois ?

D’un autre côté, je n’ai nié ni le mal ni sa mission. J’ai cru pouvoir annoncer que, le libre arbitre ayant été donné à l’homme, il ne fallait pas réserver le nom d’harmonie à un ensemble d’où le malheur serait exclu ; car le libre arbitre implique l’erreur, au moins comme possible, et l’erreur, c’est le mal. L’Harmonie sociale, comme tout ce qui concerne l’homme, est relative ; le mal est un de ses rouages nécessaires destinés à vaincre l’erreur, l’ignorance, l’injustice, en mettant en œuvre deux grandes lois de notre nature : la responsabilité et la solidarité.

Maintenant le paupérisme existant de fait, faut-il l’imputer aux lois naturelles qui régissent l’ordre social — ou bien à des institutions humaines qui agiraient en sens contraire de ces lois, — ou, enfin, à ceux-là mêmes qui en sont les victimes et qui auraient appelé sur leurs têtes ce sévère châtiment de leurs erreurs et de leurs fautes ?

En d’autres termes : le paupérisme existe-t-il par destination providentielle, — ou, au contraire, par ce qu’il reste d’artificiel dans notre organisation politique — ou comme rétribution personnelle ? Fatalité, — Injustice, — Responsabilité, à laquelle de ces trois causes faut-il attribuer l’effroyable plaie ?

Je ne crains pas de dire : Elle ne peut résulter des lois naturelles qui ont fait jusqu’ici l’objet de nos études, puisque ces lois tendent toutes à l’égalisation dans l’amélioration, c’est-à-dire à rapprocher tous les hommes d’un même niveau qui s’élève sans cesse. Ce n’est donc pas le moment d’approfondir le problème de la misère.

En ce moment, si nous voulons considérer à part cette classe de travailleurs qui exécute la partie la plus matérielle de la production et qui, en général, désintéressée de l’œuvre, vit sur une rétribution fixe qu’on nomme salaire,