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« S’il est impossible que la production ait lieu non seulement sans fonds de terre et sans capitaux, mais sans que ces moyens de production soient des propriétés, ne peut-on pas dire que leurs propriétaires exercent une fonction productive, puisque, sans elle, la production n’aurait pas lieu ? fonction commode, à la vérité, mais qui, cependant, dans l’état actuel de nos sociétés, a exigé une accumulation, fruit d’une production ou d’une épargne, etc. »


La confusion saute aux yeux. Ce qui a exigé une accumulation, c’est le rôle du propriétaire, en tant que capitaliste, et celui-là n’est pas contesté ni en question. Mais ce qui est commode, c’est le rôle du propriétaire, en tant que propriétaire, en tant que se faisant payer les dons de Dieu. C’est ce rôle-là qu’il fallait justifier, et il n’y a là ni accumulation ni épargne à alléguer.


« Si donc les propriétés territoriales et capitales (pourquoi assimiler ce qui est différent ?) sont le fruit d’une production, je suis fondé à représenter ces propriétés comme des machines travaillantes, productives, dont les auteurs, en se croisant les bras, tireraient un loyer. »


Toujours même confusion. Celui qui a fait une machine a une propriété capitale, dont il tire un loyer légitime, parce qu’il se fait payer, non le travail de la machine, mais le travail qu’il a exécuté lui-même pour la faire. Mais le sol, propriété territoriale, n’est pas le fruit d’une production humaine. À quel titre se fait-on payer pour sa coopération ? L’auteur a accolé ici deux propriétés de natures diverses pour induire l’esprit à innocenter l’une par les motifs qui innocentent l’autre.


Blanqui. « Le cultivateur, qui laboure, fume, ensemence et moissonne son champ, fournit un travail sans lequel il ne saurait rien recueillir. Mais l’action de la terre qui fait fermenter la semence, et celle du soleil qui conduit la plante à sa maturité, sont indépendantes de ce travail et concourent à la formation des valeurs que représente la récolte… Smith et plusieurs économistes ont prétendu que le travail de l’homme était l’unique source des valeurs. Non, certes, l’industrie du laboureur n’est pas l’unique source de la valeur d’un sac de blé, ni d’un boisseau de pommes de terre. Jamais son talent n’ira jusqu’à créer le phénomène de la germi-