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Il y a là deux faits combinés, fondus ensemble, quoique distincts par leur essence.

Il y a les dons naturels, les matériaux gratuits, les forces gratuites ; c’est le domaine de la Communauté.

Il y a de plus les efforts humains consacrés à recueillir ces matériaux, à diriger ces forces ; efforts qui s’échangent, s’évaluent et se compensent ; c’est le domaine de la Propriété.

En d’autres termes, à l’égard les uns des autres, nous ne sommes pas propriétaires de l’Utilité des choses, mais de leur valeur, et la valeur n’est que l’appréciation des services réciproques.

Propriété, communauté, sont deux idées corrélatives à celles d’onérosité et de gratuité, d’où elles procèdent.

Ce qui est gratuit est commun, car chacun en jouit et est admis à en jouir sans conditions.

Ce qui est onéreux est approprié, parce qu’une peine à prendre est la condition de la satisfaction, comme la satisfaction est la raison de la peine prise.

L’échange intervient-il ? il s’accomplit par l’évaluation de deux peines ou de deux services.

Ce recours à une peine implique l’idée d’un Obstacle. On peut donc dire que l’objet cherché se rapproche d’autant plus de la gratuité et de la communauté que l’Obstacle est moindre, puisque, d’après nos prémisses, l’absence complète de l’obstacle entraîne la gratuité et la communauté parfaites.

Or devant le genre humain progressif et perfectible, l’obstacle ne peut jamais être considéré comme une quantité invariable et absolue. Il s’amoindrit. Donc la peine s’amoindrit avec lui, — et le service avec la peine, — et la valeur avec le service, — et la propriété avec la valeur.

Et l’Utilité reste la même : — donc la gratuité et la communauté