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Le président de la République avait tracé une voie plus sage quand il avait dit, le jour de son installation : « Je n’ai aucune raison de croire que je ne serai pas d’accord avec l’Assemblée nationale. »

Sur quoi donc s’est fondé le cabinet pour poser d’avance, dans l’idée contraire, le point de départ de sa politique ? Sur ce que l’Assemblée nationale avait montré de la sympathie pour la candidature du général Cavaignac.

Mais le cabinet n’a donc pas compris qu’il y a une chose que l’Assemblée met cent fois et mille fois au-dessus du général Cavaignac ! C’est la volonté du peuple, exprimée par le suffrage universel, en vertu d’une constitution qu’elle-même avait formulée.

Et moi je dis que, pour témoigner de son respect pour la volonté du peuple et la constitution, nos deux ancres de salut, elle eût été peut-être plus facile avec Bonaparte qu’avec Cavaignac lui-même.

Oui, si le ministère, au lieu de débuter par élever le conflit, fût venu dire à l’Assemblée : « L’élection du 20 décembre ferme la période agitée de notre révolution. Maintenant, occupons-nous de concert du bien du peuple, de réformes administratives et financières. » Je le dis avec certitude, l’Assemblée l’aurait suivi avec passion, car elle a la passion du bien et ne peut en avoir d’autre.

Maintenant l’occasion est perdue, et si nous ne la faisons renaître, malheur à nos finances, malheur au pays, pendant des siècles.

Eh bien ! je crois que, si chacun oublie ses griefs et comprime ses rancunes, la France peut encore être sauvée.

Ministres de la République, ne dites pas : Nous agirons plus tard. Nous chercherons des réformes avec une autre Assemblée. — Ne dites pas cela, car la France est sur le bord d’un gouffre. Elle n’a pas le temps de vous attendre.

Un ministère inerte par système ! Mais cela ne s’est ja-