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instruments, subsistances, etc. ; B désire se les approprier, mais il n’a rien à donner en échange et ne doit pas les emprunter sous peine de payer un intérêt.

Il se présente à la Banque et lui dit : Livrez-moi pour mille francs de billets, je vous rembourserai sur le produit de mon travail futur au fur et à mesure de mes ventes. La banque s’exécute et donne des billets pour 990 fr.[1]. Muni de ces précieux talismans, B se présente à A et lui dit : « Vous espériez peut-être me prêter vos capitaux, mais vous voilà réduit à me les vendre, car je suis en mesure de les payer. » A s’empresse de livrer ses capitaux (terres, marchandises, subsistances) à B contre les billets. B entreprend son travail. En vertu de l’aphorisme : Tout travail doit laisser un excédant, il ajoute 10 pour 100 à la valeur qu’il vient d’acheter, court à la Banque payer (en billets sans doute) les 990 fr. qu’il lui doit, et se trouve avoir réalisé 99 fr. de profits. Ainsi de C, D, E, F, etc., en un mot de tous les hommes.

Ayant imaginé ces données, vous dressez la comptabilité de A, de B et celle de la Banque. Certes, cette compatibilité, les données étant admises, est irréprochable.

Mais peut-on admettre vos données ? Sont-elles conformes à la nature des hommes et des choses ? C’est ce qu’il s’agit d’examiner.

Les billets de la Banque offriront-ils quelques garanties ? en d’autres termes, inspireront-ils ou non de la confiance ? En d’autres termes encore, la Banque aura-t-elle ou n’aura-t-elle pas un capital primitif et des valeurs faites suffisantes pour répondre de toutes ses émissions ?

Comment réunira-t-elle le capital en valeurs faites ? Si

  1. Cette retenue de 10 fr., n’ayant pour objet que les frais de bureau, cet improprement nommée escompte. Elle pourrait être réduite à quelques centimes. Peut-être même eût-il mieux valu, dans la théorie et la comptabilité, ne point s’en préoccuper.