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ser l’intérêt et égaliser le revenu net ; il soutient qu’il faut, au contraire, commencer par centraliser le crédit et annuler l’intérêt, pour égaliser les facultés, les besoins et les chances. Qu’il n’y ait plus parmi nous de voleurs, et nous serons tous vertueux, tous heureux ! Voilà la profession de foi du socialisme ! J’éprouve le plus vif regret à vous le dire : mais vous connaissez si peu le socialisme, que vous vous heurtez contre lui sans le voir.

Vous persistez à attribuer au capital tous les progrès de la richesse sociale, que j’attribue, moi, à la circulation ; et vous me dites, à ce propos, que je prends l’effet pour la cause.

Mais, en soutenant une pareille proposition, vous ruinez, sans vous en apercevoir, votre propre thèse. J. B. Say a démontré, et vous ne l’ignorez pas, que le transport d’une valeur, que cette valeur s’appelle argent ou marchandise, constitue lui-même une valeur ; que c’est un produit aussi réel que le blé et le vin ; qu’en conséquence, le service du commerçant et du banquier mérite d’être rémunéré tout comme le service du laboureur et du vigneron. C’est sur ce principe que vous vous appuyez vous-même quand vous réclamez un salaire pour le capitaliste, qui, par la prestation de son capital, dont on lui garantit la rentrée, fait office de transport, de circulation. Par cela seul que je prête, disiez-vous dans votre première lettre, je rends un service, je crée une valeur. Telles étaient vos paroles, que nous avons admises : en cela, nous étions l’un et l’autre d’accord avec le maître.

Je suis donc fondé à dire que ce n’est pas le capital lui-même, mais la circulation du capital : c’est cette nature de service, produit, marchandise, valeur, réalité, qu’on appelle en économie politique mouvement ou circulation, et qui, au fond, constitue toute la matière de la science économique, qui est la cause de la richesse. Ce service, nous