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se compenseront ; et si, de part et d’autre, les capitaux avancés sont égaux, les intérêts se balançant, le solde ou la redevance sera nul.

Dans la société, les choses ne se passent pas tout à fait ainsi, sans doute. Les prestations que se font réciproquement les producteurs sont loin d’être égales ; partant, les intérêts qu’ils ont à se payer ne le sont pas non plus : de là, l’inégalité des conditions et des fortunes.

Mais la question est de savoir si cet équilibre de la prestation en capital, travail et talent ; si, par conséquent, l’égalité du revenu pour tous les citoyens, parfaitement admissible en théorie, peut se réaliser dans la pratique ; si cette réalisation est dans les tendances de la société ; si, enfin, et contre toute attente, elle n’est pas la conclusion fatale de la théorie de l’usure elle-même ?

Or, c’est ce qu’affirme le socialisme quand il est parvenu à se comprendre lui-même, socialisme qui ne se distingue plus alors de la science économique, étudiée à la fois dans son expérience acquise et dans la puissance de ses séductions. En effet, que nous dit, sur cette grande question de l’intérêt, l’histoire de la civilisation, l’histoire de l’économie politique ?

C’est que la prestation mutuelle de capitaux, matériels et immatériels, tend à s’équilibrer de plus en plus, et cela par diverses causes que nous allons énumérer, et que les économistes les plus rétrogrades ne peuvent méconnaître :

1° La division du travail, ou séparation des industries, qui, multipliant à l’infini les instruments de travail et les matières premières, multiplie dans la même proportion le prêt des capitaux ;

2° L’accumulation des capitaux, accumulation qui résulte de la variété des industries, et dont l’effet est de produire entre les capitalistes une concurrence analogue à celle des marchands, par conséquent d’opérer insensiblement la