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pas un argument contre nous de notre prédilection, trop prononcée peut-être, pour la liberté, et qu’on ne dise pas : Il n’est pas surprenant que ces messieurs repoussent le régime protecteur, car ils repoussent l’intervention de l’État en toutes choses.

D’abord, il n’est pas vrai que nous la repoussions en toutes choses. Nous admettons que c’est la mission de l’État de maintenir l’ordre, la sécurité, de faire respecter les personnes et les propriétés, de réprimer les fraudes et les violences. Quant aux services qui ont un caractère, pour ainsi parler, industriel, nous n’avons pas d’autre règle que celle-ci : que l’État s’en charge s’il en doit résulter pour la masse une économie de forces. Mais, pour Dieu, que, dans le calcul, on fasse entrer en ligne de compte tous les inconvénients innombrables du travail monopolisé par l’État.

Ensuite, je suis forcé de le répéter, autre chose est de voter contre une nouvelle attribution faite à l’État sur le fondement que, tout calcul fait, elle est désavantageuse et constitue une perte nationale ; autre chose est de voter contre cette nouvelle attribution parce qu’elle est illégitime, spoliatrice, et qu’elle donne pour mission au gouvernement de faire précisément ce que sa mission rationnelle est d’empêcher et de punir. Or, nous avons contre le Régime dit Protecteur ces deux natures d’objections, mais la dernière l’emporte de beaucoup dans notre détermination de lui faire, bien entendu par les voies légales, une guerre acharnée.

Ainsi, qu’on soumette, par exemple, à un conseil municipal la question de savoir s’il vaut mieux laisser chaque famille envoyer chercher sa provision d’eau à un quart de lieue, ou s’il est préférable que l’autorité prélève une cotisation pour faire venir l’eau sur la place du village ; je n’aurai aucune objection de principe à faire à l’examen de cette