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suis libre ; j’affirme que je ne le suis pas, puisque vous me réduisez à faire de mon fils, du moins à mon point de vue, un pédant, — peut être un affreux petit rhéteur, — et, à coup sûr, un turbulent factieux.

Car si encore les connaissances exigées par le Baccalauréat avaient quelques rapports avec les besoins et les intérêts de notre époque ! si du moins elles n’étaient qu’inutiles ! mais elles sont déplorablement funestes. Fausser l’esprit humain, c’est le problème que semblent s’être posé et qu’ont résolu les corps auxquels a été livré le monopole de l’enseignement. C’est ce que je vais essayer de démontrer.

Depuis le commencement de ce débat, l’Université et le Clergé se renvoient les accusations comme des balles. Vous pervertissez la jeunesse avec votre rationalisme philosophique, dit le Clergé ; vous l’abrutissez avec votre dogmatisme religieux, répond l’Université.

Surviennent les conciliateurs qui disent : La religion et la philosophie sont sœurs. Fusionnons le libre examen et l’autorité. Université, Clergé, vous avez eu tour à tour le monopole ; partagez-le, et que ça finisse.

Nous avons entendu le vénérable évêque de Langres apostropher ainsi l’Université : « C’est vous qui nous avez donné la génération socialiste de 1848. »

Et M. Crémieux s’est hâté de rétorquer l’apostrophe en ces termes : « C’est vous qui avez élevé la génération révolutionnaire de 1793. »

S’il y a du vrai dans ces allégations, que faut-il en conclure ? Que les deux enseignements ont été funestes, non par ce qui les différencie, mais par ce qui leur est commun.

Oui, c’est ma conviction : il y a entre ces deux enseignements un point commun, c’est l’abus des études classiques, et c’est par là que tous deux ont perverti le jugement et la moralité du pays. Ils diffèrent en ce que l’un fait prédominer l’élément religieux, l’autre l’élément philosophique ;