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PROPRIÉTÉ ET SPOLIATION.

du moins, vous ne soyez pas de mon avis. Je me tiens donc pour assuré que vous approuverez ma juste susceptibilité, et que vous donnerez loyalement à ma réclamation, dans vos colonnes, une place visible et un caractère lisible.

V. Considérant,
Représentant du peuple.


Paris, le 24 juillet 1848.


M. Considérant se plaint de ce que j’ai altéré ou défiguré son opinion sur la propriété. Si j’ai commis cette faute, c’est bien involontairement, et je ne saurais mieux faire, pour la réparer, que de citer des textes.

Après avoir établi qu’il y a deux sortes de Droits, le Droit naturel, qui est l’expression des rapports résultant de la nature même des êtres ou des choses, et le Droit conventionnel ou légal, qui n’existe qu’à la condition de régir des rapports faux, M. Considérant poursuit ainsi :

« Cela posé, nous dirons nettement que la Propriété telle qu’elle a été généralement constituée chez tous les peuples industrieux jusqu’à nos jours, est entachée d’illégitimité et pèche contre le Droit… L’espèce humaine est placée sur la terre pour y vivre et se développer. L’espèce est donc usufruitière de la surface du globe…

« Or, sous le régime qui constitue la Propriété dans toutes les nations civilisées, le fonds commun sur lequel l’Espèce a plein droit d’usufruit a été envahi ; il se trouve confisqué par le petit nombre à l’exclusion du grand nombre. Eh bien ! n’y eût-il en fait qu’un seul homme exclu de son droit à l’usufruit du fonds commun par la nature du régime de propriété, cette exclusion constituerait à elle seule une atteinte au Droit, et le régime de propriété qui la consacrerait serait certainement injuste, illégitime.

« Tout homme qui venant au monde dans une société civilisée ne possède rien et trouve la terre confisquée tout autour de lui, ne pourrait-il pas dire à ceux qui lui prêchent le respect pour le régime existant de la propriété, en alléguant le respect qu’on doit au droit de propriété : « Mes amis, entendons-nous et distinguons un peu les choses ; je suis fort partisan du droit de propriété et très-disposé à le respecter à l’égard d’autrui, à la seule condition qu’autrui le respecte à mon égard. Or, en tant que membre de l’espèce, j’ai droit à l’usufruit du fonds,