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pareil de magistrature, de police, de gendarmerie, de prisons, de bagnes et d’échafauds. C’est la Loi elle-même qui conduit cette guerre, et ce qui serait, selon moi, à désirer, c’est que la Loi gardât toujours cette attitude à l’égard de la Spoliation.

Mais il n’en est pas ainsi. La Loi prend quelquefois parti pour elle. Quelquefois elle l’accomplit de ses propres mains, afin d’en épargner au bénéficiaire la honte, le danger et le scrupule. Quelquefois elle met tout cet appareil de magistrature, police, gendarmerie et prison au service du spoliateur, et traite en criminel le spolié qui se défend. En un mot, il y a la spoliation légale, et c’est de celle-là sans doute que parle M. de Montalembert.

Cette spoliation peut n’être, dans la législation d’un peuple, qu’une tache exceptionnelle et, dans ce cas, ce qu’il y a de mieux à faire, sans tant de déclamations et de jérémiades, c’est de l’y effacer le plus tôt possible, malgré les clameurs des intéressés. Comment la reconnaître ? C’est bien simple. Il faut examiner si la Loi prend aux uns ce qui leur appartient pour donner aux autres ce qui ne leur appartient pas. Il faut examiner si la Loi accomplit, au profit d’un citoyen et au détriment des autres, un acte que ce citoyen ne pourrait accomplir lui-même sans crime. Hâtez-vous d’abroger cette Loi ; elle n’est pas seulement une iniquité, elle est une source féconde d’iniquités ; car elle appelle les représailles, et si vous n’y prenez garde, le fait exceptionnel s’étendra, se multipliera et deviendra systématique. Sans doute, le bénéficiaire jettera les hauts cris ; il invoquera les droits acquis. Il dira que l’État doit Protection et Encouragement à son industrie ; il alléguera qu’il est bon que l’État l’enrichisse, parce qu’étant plus riche il dépense davantage, et répand ainsi une pluie de salaires sur les pauvres ouvriers. Gardez-vous d’écouter ce sophiste, car