Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/516

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comme vrais, il doit en résulter qu’au lieu de nous laisser confinés dans le commerce, comparativement insignifiant, d’îles ou de continents presque déserts, la liberté du commerce nous donnera accès sur le marché du monde entier. En abandonnant le monopole du commerce de nos colonies, nous ne ferons qu’échanger un privilége misérable, contre le privilége du commerce avec le monde entier. Que personne ne vienne donc dire qu’en abandonnant ce monopole, l’Angleterre nuira à sa puissance ou à sa prospérité futures ! On m’objecte enfin que nos colonies servent d’exutoires à notre population surabondante, et, qu’en les laissant, nous fermerons ces exutoires utiles. À quoi je réponds que si nous permettons à nos colonies de se gouverner elles-mêmes, elles offriront plus de ressources à nos émigrants que si elles continuent à être mal gouvernées par la métropole. D’ailleurs, que se passe-t-il aujourd’hui ? Beaucoup plus d’Anglais émigrent chaque année aux États-Unis que dans toutes nos colonies réunies. (Applaudissements.) Pourquoi ? parce que, grâce à la liberté dont jouissent les États-Unis, l’accroissement du capital y est tel, qu’un plus grand nombre de travailleurs peuvent y trouver de bons salaires que dans les pays que nous gouvernons. Accordez à nos colonies une liberté et une indépendance semblables à celles dont jouissent les États-Unis, accordez-leur l’élection de leurs fonctionnaires et la faculté de pourvoir elles-mêmes à leurs propres dépenses, accordez-leur ce stimulant ; et elles progresseront bientôt assez pour donner à votre émigration une issue plus large et meilleure. Un autre avantage que je trouve dans l’application du self-government à nos colonies, c’est qu’elles ouvriront une carrière plus large à l’ambition des classes supérieures. Les membres de ces classes se rendront aux colonies lorsque le self-government fournira une carrière à leur capacité de juges, d’administrateurs, etc., tandis que la centralisation du bureau de Downing-street les décourage aujourd’hui d’y aller. Ce n’est pas que je veuille jeter un blâme spécial sur le colonial-office. Je crois que les colonies seraient gouvernées plus mal encore par la Chambre des communes ; c’est le système que je blâme. Je conclus donc en vous suppliant de demander pour nos colonies