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votre ministre, sachez-le bien ; et quand il reprit le portefeuille, ce fut en qualité de ministre du souverain, de ministre du peuple, — non de ministre d’une coterie, pour servir d’instrument docile à son égoïsme. » À ce témoignage inattendu de bienveillance pour lui, les membres qui siégeaient près de sir Robert Peel, virent des larmes mouiller sa paupière.

La discussion générale durait encore le vendredi suivant. Dans cette nuit du vendredi au samedi, M. Cobden battit en brèche avec grande vigueur un argument spécial, au moyen duquel les protectionnistes s’efforçaient de renvoyer la décision à une autre législature. À trois heures et demie du matin, on mit aux voix la question de savoir si la proposition ministérielle serait examinée et discutée dans ses détails. 337 membres votèrent pour l’affirmative et 240 contre. Si favorable que fût ce vote, il n’assurait pas l’adoption complète du plan soumis au débat. Une scission pouvait se produire dans une majorité improvisée, dont les éléments étaient fort hétérogènes ; et la minorité ne manquait pas de chances pour obtenir que la taxe proposée, tout en conservant le caractère mobile et temporaire, fût plus élevée et plus durable que ne le voulaient les ministres. L’événement ne confirma pas ces conjectures. En vain les protectionnistes disputèrent le terrain et employèrent tous les moyens de prolonger la lutte ; le 27 mars, la seconde lecture du bill fut adoptée par une majorité de 88 membres, et la troisième lecture, le 16 mai, par une majorité de 98 (327 contre 229). Dans la Chambre des lords, le bill rencontra moins d’obstacles et de lenteurs qu’on ne s’y attendait. Le 26 mai, il devint définitivement loi de l’État.

Peu après sir Robert Peel rentrait dans la vie privée. Au moment de quitter le pouvoir, dans un dernier discours parlementaire, il dit, au sujet des grandes mesures qu’il avait inaugurées :

« Le mérite de ces mesures, je le déclare à l’égard des hono-