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tions personnelles. Il est des gens qui pensent qu’il y a du bon sens et de la politique dans une coalition de cette nature. Mais quelle sorte de coalition était celle de lundi dernier, entre les libéraux d’un côté et les ultra-monopoleurs de l’autre, entre lord John Russell avec ses Whigs et lord John Manners avec sa « jeune Angleterre » ? Si l’esprit de faction n’aveuglait pas les hommes ; s’il ne les empêchait pas de voir plus loin que leur nez, ne se demanderaient-ils pas à quoi cela peut mener ? En admettant que cette combinaison réussît à renverser leur rival, où les conduirait-elle eux-mêmes ? Au premier vote, on verrait une majorité, composée de tels ingrédients, se dissoudre et se transformer en une impuissante minorité. Et qu’en résulterait-il pour sir Robert Peel ? Supposez que la reine envoie chercher lord John Russell et lui demande de former un cabinet, quel conseil donnerait lord John à Sa Majesté ? Probablement d’envoyer quérir sir Robert de nouveau.

Pense-t-on qu’avec une majorité de 90 voix, dans toutes les questions politiques, sir Robert peut être dépossédé par d’aussi misérables manœuvres ? Si les partis se balançaient à peu près, s’ils présentaient les mêmes forces à 10 ou 20 voix près, il y aurait peut-être ouverture à cette tactique des partis. Mais, avec une majorité de 90 à 100 voix du côté de sir Robert Peel, comment de telles intrigues porteraient-elles ses adversaires au pouvoir ? Non, non, le moyen d’arriver au pouvoir, si lord John Russell elles Whigs le désirent tant, ce n’est pas de s’associer, au mépris des principes, avec les ultra-monopoleurs ; cette tactique ne réussirait pas, même en France, où les hommes politiques sont moins scrupuleux qu’en Angleterre, et moins retenus par le contrôle éclairé de l’opinion publique ; mais si ce noble lord veut arriver au pouvoir, qu’il déploie sa force au dehors, afin d’accroître son influence dans la Chambre des communes » (Acclamations.) Et quel est pour lui, comme pour tout homme politique, le moyen d’acquérir du crédit au dehors ? Ce n’est point de faire obstacle à cette liberté commerciale qu’il fait profession d’admettre en principe, mais, au contraire, d’adhérer étroitement à ce principe, prêt à s’élever ou à tomber avec lui. Je suis fâché de dire que telles sont les idées des deux grands