Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/341

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gleterre, orgueilleuse Angleterre, efface de ton écusson le fier lion britannique et mets à la place un ouvrier mourant en implorant vainement du pain. » (Acclamations prolongées.) Que répondit Méhémet-Ali à un Anglais qui lui reprochait son système de monopole, car il est le grand et universel monopoleur de l’Égypte ? « Allez, dit le pacha, allez abolir chez vous le monopole des céréales, et vous me trouverez prêt ensuite à vous accorder toutes les facilités commerciales que vous pouvez désirer. » Ainsi, soit le grave pacha d’Alexandrie, soit l’Américain susceptible ou le Français aux formes polies, chacun nous jette à la face notre propre inconséquence ; et on ne peut pas comprendre comment le peuple d’Angleterre, qui prétend se gouverner par un Parlement de son choix, tolère ce fléau destructeur qu’on appelle lois-céréales. (Acclamations.) Mais il est consolant de penser que nous sommes enfin aux prises avec la dernière difficulté. La Chambre des communes n’était pas notre plus grand obstacle. Je crois qu’on peut dire avec vérité de la plupart des grandes questions, qu’elles seront emportées, quelle que soit la composition de la Chambre des communes, aussitôt que le peuple appréciera pleinement, généralement et universellement la nature et la portée de ce qu’il demande. Je ne puis voir avec découragement la Chambre des communes, toute mauvaise qu’elle est. Considérée en elle-même, et dans les éléments de réforme qu’elle recèle, elle est incurable, dépourvue qu’elle est de tout germe de restauration ou de rénovation. Mais je sais aussi, par l’histoire des trente dernières années, que le peuple n’a qu’à être unanime pour réussir. (Bruyants applaudissements.) Si nous avons obtenu le rappel de l’acte de coopération, d’un Parlement anglican, — l’émancipation catholique, d’une législature Orangiste, — la réforme électorale d’une Chambre nommée par les bourgs-pourris, — l’abolition de la traite et de l’esclavage, d’une assemblée de possesseurs d’hommes, eh bien ! nous arracherons la liberté commerciale à un Parlement de monopoleurs. (Applaudissements.)

Permettez-moi de vous dire quelques mots sur la question des sucres. Je le fais avec quelque répugnance, car dans une occasion récente, où ma santé m’a empêché d’assister à votre réunion,