Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/333

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plus modérés. Mais la principale chose que les Français stipulèrent en retour, c’est qu’ils pourraient recevoir nos machines à filer et tisser le lin. Cela était regardé par la France comme une grande concession. Elle se souciait peu des machines à filer le coton, ayant appris depuis longtemps à les faire aussi bien que nous. Mais elle désirait ardemment recevoir nos machines linières, branche d’industrie dans laquelle nous faisions de rapides progrès. — La stipulation fut arrêtée, nos manufacturiers consultés acquiescèrent libéralement à l’exportation des machines linières. — Sur ces entrefaites, l’ancien cabinet fut renversé et le traité de commerce n’eut pas de suite. — Cependant, l’année dernière, notre gouvernement, sans avoir en vue aucun traité, affranchit le commerce des machines, comme il devrait faire de tous les autres. Il purgea notre Code commercial, notre tarif, de ce fléau, la prohibition de l’exportation des machines. — Eh bien, quoique la libre exportation des machines linières de ce pays pour la France fût précisément la stipulation qui lui tenait tant au cœur, il y a trois ans, quelle a été sa première démarche alors que nous avons affranchi ces machines de tous droits ? Dans cette session, dans ce moment même, elle fait des lois pour exclure nos machines ; et ce qui est le comble de l’inconséquence, elle va mettre un droit de 30 fr. par cent kilog. sur les machines cotonnières dont elle ne s’inquiétait pas, et un droit de 50 fr. sur les machines linières dont elle désirait avec tant d’ardeur la libre introduction. (Écoutez ! écoutez !) Et comment justifie-t-on une conduite si déraisonnable ? Si vous parlez de cela à un Français, il vous dira : « L’Angleterre est devenue puissante par ses machines ; donc il importe à un pays d’avoir des machines, et par ce motif nous exclurons les vôtres afin d’encourager nos propres mécaniciens. » Voilà une manière d’agir qui nous semble bien inconséquente, bien extravagante dans les Français ; mais il n’est pas une des restrictions que nous imposons à notre commerce qui ne soit entachée de la même inconséquence, d’une semblable absurdité. (Écoutez ! écoutez !) Passez en revue tous les articles de notre tarif ; choisissez les articles dont nous avons le plus grand besoin, et vous les verrez assujettis aux plus sévères restrictions.