Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/302

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étaient possesseurs d’esclaves. Ils nous arrêtaient à chaque pas, quand nous nous efforcions de détruire par la loi ce qui avait été créé par la loi. (Écoutez !) Ils défendirent jusqu’au dernier moment les prétendus droits des planteurs, et refusèrent d’accorder la liberté aux nègres jusqu’à ce qu’on leur eût jeté et qu’ils se fussent partagé la plus grande somme d’argent qui ait jamais été votée dans des vues d’humanité ! Alors comme aujourd’hui, ils étaient les organes du monopole ; ils parlaient et agissaient comme des hommes profondément intéressés au maintien des restrictions. Le sentiment public était contre eux alors ; le sentiment national est encore contre eux maintenant. — Ils n’étaient pas sincères alors, ou ils pratiquent la déception aujourd’hui. Ils parlent et votent contre leur conscience maintenant, ou ils doivent être préparés à dire qu’ils parlaient et votaient contre leur conscience autrefois. (Écoutez !) Pour nous, nous sommes sur le terrain où nous étions il y a quatorze ans. Nous disons que l’esclavage est un crime ; que travailler par des moyens honnêtes à son abolition, c’est le devoir des individus et des nations. C’était notre droit de pétitionner contre l’esclavage ; c’était le droit de la législature de l’abolir par acte du Parlement passé en conformité de la volonté nationale. — Mais forcer trente millions de citoyens de payer des sommes énormes sous forme de prix additionnel pour une denrée de première nécessité ; — diminuer de moitié, par l’emploi de la force brutale, l’approvisionnement de cette denrée ; — dépouiller les hommes du droit d’acheter ce qui est porté sur le marché, parce que dans les opérations de la production une injustice a été commise en pays étrangers, — ce n’est pas du droit, c’est de la rapine (bruyants applaudissements) ; et agir ainsi sous le prétexte de prendre en main la cause de la liberté et de l’humanité, quand nous savons (autant qu’il est possible d’avoir cette certitude) que ce prétexte est faux, vide et hypocrite, c’est ajouter la fraude mentale à la tyrannie législative, et pratiquer la dissimulation aux yeux de Dieu en même temps que l’injustice à l’égard des hommes. Ce serait au moins faire montre de quelque honnêteté que d’appliquer le principe avec impartialité ; mais c’est ce qu’on ne fait pas. Le droit sur le sucre du Brésil