Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/298

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se complotent sans remords. Là, enfin, des créatures proscrites, se croyant abandonnées de Dieu et de l’homme, se regardent comme les victimes de la législation, ou sentant du moins qu’elle n’est pour elles ni une protection ni un refuge, s’insurgent contre la société, puisque aussi bien le sort qui les attend ne saurait être pire que celui qu’elles endurent. (Bruyantes acclamations.) Voilà ce qui se passe en Angleterre. — Je veux que vous compreniez bien que l’existence d’un tel état de choses révèle l’existence de quelque mauvaise loi, qui étouffe le commerce de ce pays, qui nous ferme les marchés du monde, en empêchant les produits des autres contrées de venir ici pour satisfaire à nos besoins. Une misère aussi profonde, une indigence aussi abjecte, une souffrance aussi incurable n’existe ailleurs nulle part. Quoi qu’aient pu faire dans d’autres pays le despotisme et la superstition, ils ne sont point parvenus, comme nos lois, à affamer une population active et laborieuse, à qui il reste au moins la faculté d’échanger ce qu’elle produit contre ce dont elle a besoin. (Acclamations bruyantes et prolongées.) — J’ai beaucoup voyagé ; j’ai vu l’ignorance la plus profonde ; la superstition la plus sombre et la plus terrible ; le despotisme le plus illimité et le plus rigoureux ; la théocratie la plus orgueilleuse et la plus tyrannique; mais une misère semblable à celle que je vois ici et qui nous entoure, je ne l’ai vue nulle part. (Applaudissements.)


Ici l’orateur discute le principe et les effets des lois-céréales, et arrivant à la question des sucres, il continue en ces termes :


Je viens de vous parler des lois-céréales ; permettez-moi de vous entretenir de la loi des sucres. — Personne ne me soupçonnera, je pense, de désirer le maintien de l’esclavage. S’il se trouvait dans cette enceinte quelque personne disposée à diriger contre moi une telle accusation, il me suffirait de lui dire, en signalant l’histoire de mes actes et de ma vie passée : — Voilà ma réponse. (Acclamation.) — J’ai le regret de différer d’opi-