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Et, chose qui passe toute croyance, plusieurs veulent en même temps que le travail qui produit ces choses soit diminué. Quelques-uns même, heureusement en petit nombre, vont jusqu’à solliciter la destruction des machines.

Se peut-il concevoir une contradiction plus flagrante ?

À moins que le miracle de l’urne de Cana ne se renouvelle dans la caisse du percepteur, comment veut-on que l’État y puise plus que le peuple n’y a mis ? Croit-on que, pour chaque pièce de cent sous qui y entre, il soit possible d’en faire sortir dix francs ? Hélas ! c’est tout le contraire. La pièce de cent sous que le peuple y jette tout entière n’en sort que fort ébréchée, car il faut bien que le percepteur en garde une partie pour lui.

En outre, que signifie l’argent ? Quand il serait vrai qu’on peut puiser dans le Trésor public un fonds de salaires autre que celui que le public lui-même y a mis, en serait-on plus avancé ? Ce n’est pas d’argent qu’il s’agit, mais d’aliments, de vêtements, de logement, etc.

Or, l’organisateur qui siége au Luxembourg a-t-il la puissance de multiplier ces choses par des décrets ? ou peut-il faire que, si la France produit 60 millions d’hectolitres de blé, chacun de nos 36 millions de concitoyens en reçoive 3 hectolitres, et de même pour le fer, le drap, le combustible ?

Le recours au Trésor public, comme système général, est donc déplorablement faux. Il prépare au peuple une cruelle déception.

On dira sans doute : « Nul ne songe à de telles absurdités. Mais il est certain que les uns ont trop en France, et les autres pas assez. Ce à quoi l’on vise, c’est à un juste nivellement, à une plus équitable répartition. »

Examinons la question à ce point de vue.

Si l’on voulait dire qu’après avoir retranché tous les impôts qui peuvent l’être, il faut, autant que possible, faire