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De quoi s’agit-il ? de fournir à l’activité humaine de nouveaux aliments. C’est ce qui lui manque ; et, pour cela, de faire le vide dans les moyens actuels de satisfaction, — de créer une grande demande de produits.

J’avais d’abord pensé qu’on pourrait fonder de grandes espérances sur l’incendie, — sans négliger la guerre et la peste. — Par un bon vent d’ouest mettre le feu aux quatre coins de Paris, ce serait certainement assurer à la population les deux grands bienfaits que le régime protecteur a en vue : travail et cherté. — ou plutôt travail par cherté. Ne voyez-vous pas quel immense mouvement l’incendie de Paris donnerait à l’industrie nationale ? En est-il une seule qui n’aurait de l’ouvrage pour vingt ans ? Que de maisons à reconstruire, de meubles à refaire, d’outils, d’instruments, d’étoffes, de livres et de tableaux à remplacer ! Je vois d’ici le travail gagner de proche en proche et s’accroître par lui-même comme une avalanche, car l’ouvrier occupé en occupera d’autres et ceux-ci d’autres encore. Ce n’est pas vous qui viendrez prendre ici la défense du consommateur, car vous savez trop bien que le producteur et le consommateur ne font qu’un. Qu’est-ce qui arrête la production ? Évidemment les produits existants. Détruisez-les, et la production prendra une nouvelle vie. Qu’est-ce que nos richesses ? ce sont nos besoins, puisque sans besoins point de richesses, sans maladies point de médecins, sans guerres point de soldats, sans procès point d’avocats et de juges. Si les vitres ne se cassaient jamais, les vitriers feraient triste mine ; si les maisons ne s’écroulaient pas, si les meubles étaient indestructibles, que de métiers seraient en souffrance ! Détruire, c’est se mettre dans la nécessité de rétablir. Multiplier les besoins, c’est multiplier la richesse. Répandez donc partout l’incendie, la famine, la guerre, la peste, le vice et l’ignorance, et vous verrez fleurir toutes les professions, car toutes auront un vaste champ d’activité. Ne dites-