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seaux, suif, etc., et les farines de toutes sortes sauf la farine d’avoine. Et voyez, Messieurs, quelle minutieuse sollicitude se révèle jusque dans cette singulière exception. Pourquoi exclure seulement la farine d’avoine ? Cela ne peut s’expliquer que par la crainte que les spéculateurs ne mêlassent à la nourriture du peuple un ingrédient grossier indigne de l’homme.

Maintenant voici quelques articles dont la sortie est entièrement prohibée :

Argent et or, bestiaux, matières résineuses, chanvre, coton en laine, cuirs, cuivre, grains et farines de toutes sortes, laines, lins, engrais, matières premières du papier, suif, etc., etc.

Messieurs, le peuple de 93 n’était pas plus profond économiste que celui de 1822 ; mais on le consultait alors. On lui demandait : Veux-tu qu’on taxe le froment étranger afin d’élever le prix du froment naturel ? Et, avec ce bon sens que je vous ai signalé chez les Suisses, il répondit : Non. (Rire général.)

Une preuve que ce n’est pas le progrès de l’économie politique qui dirigeait le législateur en veste, c’est un article bien remarquable que je dois encore vous lire.

On voulait tout laisser entrer ; on ne voulait rien laisser sortir. C’était une contradiction. Évidemment pour recevoir, il faut payer. On se condamnait donc à tout payer en or. Mais à cette époque, comme aujourd’hui, on était convaincu que la sortie de l’or est une calamité publique. Comment donc échapper à la difficulté ?

On décréta qu’il serait défendu, sous des peines sévères (en harmonie avec les mœurs de l’époque), d’exporter de l’or, « à moins qu’on ne prouve, dit le décret, qu’on en fait entrer la contre-valeur en objets nécessaires à la consommation du peuple ; » et à la suite on désigne toujours les mêmes objets : Bestiaux, grains, farines, lin, suifs, etc.