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nuée ; pour l’ouvrir, il n’y a aucune atténuation possible.

Aussi, je me représente quelquefois un simple ouvrier, trouvant, je ne sais par quelle issue, accès dans l’enceinte législative. Ce serait certainement un spectacle curieux et même imposant, s’il se présentait à la barre de l’assemblée étonnée, — calme, modéré, mais résolu, et si, au milieu du silence universel, il disait : « Vous avez élevé, par la loi, le prix des aliments, des vêtements, du fer, du combustible ; vous nous promettiez que le ricochet de ces mesures élèverait notre salaire en proportion et même au delà. Nous vous croyions, car l’appât d’un profit, fût-il illégitime, hélas ! rend toujours crédule. Mais votre promesse a failli. Il est bien constaté maintenant que votre loi, n’ayant pu que déplacer le capital et non l’accroître, n’a eu d’autre résultat que de faire peser sur nous, sans compensation, le poids de la cherté. Nous venons vous demander d’élever législativement le taux des salaires, au moins dans la même mesure que vous avez élevé législativement le prix de la subsistance. »

Je sais bien ce qu’on répondrait à ce malencontreux pétitionnaire. On lui dirait, et avec raison : « Il nous est impossible d’élever par la loi le taux du salaire ; car la loi ne peut pas faire qu’on tire d’un capital donné plus de salaires qu’il n’en renferme. »

Mais je me figure que l’ouvrier répliquerait : « Eh bien ! ce que vous dites que la loi ne peut faire directement, elle ne l’a pas fait indirectement selon vos promesses. Puisqu’il n’est pas en votre pouvoir de renchérir le salaire, ne renchérissez pas la vie. Nous ne demandons pas de faveur, nous demandons franc jeu, et que les produits soient purs de toute intervention législative, puisque le salaire est inaccessible à l’intervention législative. »

En vérité, Messieurs, je n’imagine pas ce qu’on pourrait