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l’affranchissement en passant par cette route de guerres, de violences, de dangers, de taxes et de monopoles, alors qu’il déclare la route ruineuse, et, qui pis est, le but absurde ?

Le parti guerroyant, en Angleterre, assigne, il est vrai, un autre motif aux mesures qu’il sollicite. Il redoute l’esprit militaire de la France ; il craint une invasion.

Le moment est singulièrement choisi. Cependant, qu’en conséquence de cette crainte, l’Angleterre organisât ses forces défensives, qu’elle constituât ses milices, nous n’y trouverions rien à redire ; mais qu’elle accroisse ses armées permanentes et sa marine militaire, en un mot, ses forces agressives, c’est là une politique qui nous semble en complète contradiction avec le système commercial qu’elle vient d’inaugurer, et qui n’aura d’autre résultat que d’ébranler toute foi dans l’influence pacifique du libre-échange.

On accuse souvent l’Angleterre de n’avoir décrété la liberté commerciale que pour entraîner les autres nations dans cette voie. Ce qui se passe donne un triste démenti à cette accusation.

Certes, si l’Angleterre avait voulu agir fortement sur l’opinion du dehors, si elle avait eu elle-même une foi complète au principe du libre-échange considéré dans tous ses aspects et dans tous ses effets, son premier soin aurait été d’en recueillir les véritables fruits, de réduire ses régiments, ses vaisseaux de guerre, d’alléger le poids des taxes publiques, et de faire disparaître ainsi les entraves que les exigences d’une vaste perception infligent toujours au travail du peuple.

Et, dans cette politique, l’Angleterre aurait trouvé, par surcroît, les deux grandes sources de toute sécurité : la diminution du danger et l’accroissement des véritables énergies défensives. — Car, d’une part, c’est affaiblir le danger de l’invasion que de suivre envers tous les peuples une po-