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veur des lois partiales ? Quoi de plus propre que de telles lois à semer l’irritation au sein du peuple, à faire que, dans son esprit, ses souffrances ont leur cause dans une injustice ; à lui suggérer l’idée que la ligne de démarcation entre le pauvre et le riche est l’œuvre d’une volonté perverse, et qu’une aristocratie nouvelle, sous le nom de bourgeoisie, s’est élevée sur les ruines de l’ancienne aristocratie ? De telles lois ne le disposent-elles pas à embrasser les doctrines les plus chimériques, surtout si elles se présentent avec le cachet d’une simplicité trompeuse ; en un mot ne le poussent-elles pas fatalement vers le communisme ?

Contre le communisme, il n’y a que deux préservatifs. L’un, c’est la diffusion au sein des masses des connaissances économiques ; l’autre, c’est la parfaite équité des lois émanées de la bourgeoisie.

Oh ! puisque, dans l’état actuel des choses, nous voyons des ouvriers eux-mêmes se retourner contre le communisme et faire obstacle à ses progrès, combien la bourgeoisie serait forte contre ce dangereux système si elle pouvait dire aux classes laborieuses :

« De quoi vous plaignez-vous ? De ce que nous jouissons de quelque bien-être ; mais nous l’avons acquis par le travail, l’ordre, l’économie, la privation, la persévérance. Pouvez-vous l’attribuer à d’autres causes ? Examinez nos lois. Vous n’en trouverez pas une qui stipule pour nous des faveurs. Le travail y est traité avec la même impartialité que le capital. L’un et l’autre sont soumis, sans restriction, à la loi de la concurrence. Nous n’avons rien fait pour donner à nos produits une valeur artificielle et exagérée. Les transactions sont libres, et si nous pouvons employer des ouvriers étrangers, de votre côté vous avez la faculté d’échanger vos salaires contre des aliments, des vêtements, du combustible, venus du dehors, quand il arrive que nous tenons les nôtres à un taux élevé. »