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Et remarquez qu’elle est d’autant moins indispensable qu’il y a, dans le cœur humain, des stimulants, — dans l’enchaînement des causes et des effets, des récompenses pour l’activité, des châtiments pour la paresse, qui agissent avec une force à laquelle l’action du pouvoir n’ajouterait que peu de chose. Ce sont ces stimulants, c’est cette rétribution naturelle dont ne nous paraissent pas tenir assez compte les écoles qui, faisant bon marché de la liberté, veulent tout réformer par l’interférence du Gouvernement.

Ce n’est pas seulement contre les vices dont les conséquences retombent sur ceux qui s’y livrent que la nature a préparé des moyens de prévention et de répression, mais aussi contre les vices qui affectent les personnes qui en sont innocentes. Dans l’ordre social, outre la loi de responsabilité, il y a une loi de solidarité. Les vices de cette catégorie, par exemple la mauvaise foi, ont la propriété d’exciter une forte réaction de la part de ceux qui en souffrent contre ceux qui en sont atteints, réaction qui a certainement une vertu préventive et répressive, toujours exactement proportionnelle au degré de lumière d’un peuple.

Ce n’est point à dire que le Gouvernement ne puisse concourir aussi à punir ces vices, à prévenir ces abus. Tout ce que nous prétendons, et nous ne pensons pas que cela puisse nous être contesté, c’est que cette pression gouvernementale doit s’arrêter et laisser agir les forces naturelles, au point où elle-même a, pour la communauté, plus d’inconvénients que d’avantages.

Nous ajouterons qu’un des inconvénients de la trop grande intervention du pouvoir en ces matières, est de paralyser la réaction des forces naturelles, en affaiblissant les motifs et l’expérience de cette police que la société exerce sur elle-même. Là où les citoyens comptent trop sur les autorités, ils finissent par ne pas assez compter sur eux-