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contribuables et comme contribuable, ayant donné des garanties qu’il ne veut et ne peut pas être autre chose, se lèvera à la Chambre pour dire soit aux ministres en titre, soit aux ministres en expectative : Messieurs, disputez-vous le pouvoir, je ne cherche qu’à le contenir ; disputez-vous la manipulation du budget, je n’aspire qu’à le diminuer ; ah ! soyez sûr que ces furieux athlètes, si acharnés en apparence, sauront fort bien s’entendre pour étouffer la voix du mandataire fidèle. Ils le traiteront d’utopiste, de théoricien, de réformateur dangereux, d’homme à idée fixe, sans valeur pratique ; ils l’accableront de leur mépris ; ils tourneront contre lui la presse vénale. Mais si les contribuables l’abandonnent, tôt ou tard ils apprendront qu’ils se sont abandonnés eux-mêmes.

Voilà ma pensée toute entière, messieurs ; je l’ai exposé sans déguisement, sans détour, tout en regrettant de ne pouvoir la corroborer de tous les développements qui auraient pu entraîner vos convictions. J’espère en avoir assez dit, cependant, pour que vous puissiez apprécier la ligne de conduite que je suivrais si j’étais votre mandataire, et il est à peine nécessaire d’ajouter que mon premier soin serait de me placer, à l’égard du pouvoir et de l’opposition ambitieuse, dans cette position d’indépendance qui seule peut donner des garanties, et qu’il faut bien s’imposer, puisque la loi n’y a pas pourvu.

Après avoir établi le principe qui doit, selon moi, dominer toute la carrière parlementaire de vos représentants, permettez-moi de dire quelque chose des objets principaux auxquels ce principe me semble devoir être appliqué.

Vous avez peut-être entendu dire que j’avais consacré quelques efforts à la cause de la liberté commerciale, et il est aisé de voir que ces efforts sont conséquents à la pensée fondamentale que je viens d’exposer sur les limites naturelles de la puissance publique. Selon moi, celui qui a créé un