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vahir des tribus paisibles, sous le prétexte le plus frivole, porter le fer et le feu dans les pays dont elles veulent s’emparer, brûler les maisons, couper les arbres, ravir les propriétés, violer les lois, les usages, les mœurs et la religion des habitants ; on les verra chercher à corrompre avec de l’or ceux que le fer n’aura pas abattus, décerner des récompenses et des honneurs à ceux de leurs ennemis qui auront trahi la patrie, et vouer une haine implacable à ceux qui, pour la défendre, se dévouent à toutes les horreurs d’une lutte sanglante et inégale. Quelle école ! quelle morale ! quelle appréciation des hommes et des choses ! et se peut-il qu’au XIXe siècle un tel exemple soit donné, dans l’Inde et en Afrique, par les deux peuples qui se prétendent les dépositaires de la loi évangélique et les gardiens du feu sacré de la civilisation !

J’appelle l’attention de mon pays sur une situation qui me paraît ne pas le préoccuper assez. Le système prohibitif est mauvais, c’est ma conviction. Cependant, tant qu’il a été général, il enfantait partout des maux absolus sans altérer profondément la grandeur et la puissance relatives des peuples. L’affranchissement commercial d’une des nations les plus avancées du globe nous place au commencement d’une ère toute nouvelle. Il ne se peut pas que ce grand fait ne bouleverse toutes les conditions du travail, au sein de notre patrie ; et si j’ai osé essayer de décrire les changements qu’il semble préparer, c’est que l’indifférence du public à cet égard me paraît aussi dangereuse qu’inexplicable.