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Plus l’impôt indirect se rapproche dans la pratique de cette double donnée théorique, plus il remplit toutes les conditions qu’on doit rechercher dans une telle institution, 1o de faire contribuer chacun selon sa fortune ; 2o de ne pas porter atteinte à la production ; 3o de gêner le moins possible les mouvements de l’industrie et du commerce ; 4o de restreindre les profits et par conséquent le domaine de la fraude ; 5o de n’imposer à aucune classe de citoyens des entraves exceptionnelles ; 6o de suivre servilement toutes les oscillations de la richesse publique ; 7o de se prêter avec une merveilleuse flexibilité à toutes les distinctions qu’il est d’une saine politique d’établir entre les produits, selon qu’ils sont de première nécessité, de convenance et de luxe ; 8o d’entrer facilement dans les mœurs, en imposant à l’opinion ce respect dont elle ne manque pas d’entourer tout ce qui porte un caractère incontestable d’utilité, de modération et de justice.

Il semble que c’est sur le principe diamétralement opposé, limitation quant au nombre des objets taxés, exagération quant à la quotité de la taxe, que l’on ait fondé notre système financier en cette matière.

On a fait choix, entre mille, de deux ou trois produits, le sel, les boissons, le tabac, — et on les a accablés.

Encore une fois, il ne pouvait guère en être autrement. Ce n’est pas de perfection, de justice que se préoccupait le chef de l’État, pressé d’argent. C’était d’en faire arriver au trésor abondamment et facilement, et, disposant d’une force capable de vaincre toutes les résistances, il ne lui restait qu’à discerner la matière éminemment imposable, et à la frapper à coups redoublés[1].

En ce qui nous concerne, les boissons ont dû se présenter

  1. « Il est reconnu que, de toutes les matières imposables, les boissons sont celles sur lesquelles l’impôt peut être le plus considérable et le plus facilement perçu. » M. de Villèle.