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difficultés seraient surmontées ! Ah ! croyez-le bien, ce n’est ni la tête, ni le cœur qui me manquent. Mais je sens que cette superbe Babylone n’est pas ma place, et il faut que je me hâte de rentrer dans ma solitude et de borner mon concours à quelques articles de journaux, à quelques écrits. N’est-il pas singulier que je sois arrivé à l’âge où les cheveux blanchissent, témoin des progrès du luxe et répétant comme ce philosophe grec : Que de choses dont je n’ai pas besoin ! et que je me sente à mon âge envahi par l’ambition. L’ambition ! oh ! j’ose dire que celle-là est pure, et si je souffre de ma pauvreté, c’est qu’elle oppose un obstacle invincible à l’avancement de la cause.

Pardonnez-moi, mon cher Monsieur, ces épanchements de mon cœur. Je vous parle de moi quand je ne devrais vous entretenir que d’affaires publiques.

Adieu, croyez-moi toujours votre bien affectionné et dévoué.


Paris, 2 avril 1846.

Mon cher Monsieur, ainsi que je vous l’ai annoncé, votre réponse à l’adresse de la société des économistes paraîtra dans le prochain numéro du Journal des Économistes. Elle fera, j’espère, un bon effet. Mais vu l’extrême susceptibilité de nos concitoyens, on a jugé à propos de ne pas l’insérer dans les journaux quotidiens et d’attendre que notre association parisienne fût un peu plus avancée.

Ce qui nous manque surtout, c’est un organe, un journal spécial, comme la Ligue. Vous me direz qu’il doit être l’effet de l’association. Mais je crois bien que, dans une certaine mesure, c’est l’association qui sera l’effet du journal ; nous n’avons pas de moyens de communication et aucun journal accrédité ne peut nous en servir.

Donc j’ai pensé à créer ici un journal hebdomadaire intitulé le Libre Échange. Hier soir on m’en a remis le devis. Il